Apprendre à prier à l'ère de la technique

publié dans Littérature étrangère

Apprendre-a-prier-a-lere-technique.jpgMon avis : 5.gif

 

Grand auteur, grand roman, grande découverte ! Surtout ne pas se fier au titre pas très fun et encore moins à la quatrième de couverture.

Tavares est quasi inconnu en France, si ce n’est par ce roman, qui a obtenu le prix du meilleur livre étranger Hyatt Madeleine  2010. Et chez les deux principaux libraires lillois, il faut soit le commander soit faire preuve d’une très grande souplesse dorsale pour trouver le précieux tout en bas des rayons…

 

« Apprendre à prier à l’ère de la technique », est en fait le dernier tome d’une quadrilogie intitulé « Le Royaume », mais l’on peut tout à fait lire ce roman sans connaître les autres, ce qui est mon cas.

Un mot me vient après cette lecture : saisissant !

Lenz Buchmann est chirurgien dans un pays non identifié (Allemagne ?) à une époque non précisée (probablement au 20ème siècle). Mais ce n’est pas le sujet. Le sujet, c’est Lenz lui-même, homme froid, largement dépourvu de sentiments, avec des comportements hors de toute « bonne » morale. Il opère avec sa main sacrée, mais ne venez pas lui parler de remerciement de patient lorsqu’il a sauvé une vie. Opérer, c’est pour lui un acte purement technique, le corps est une machine qu’il arrive à dominer avec jubilation.

Et puis un jour, à un enterrement, une évidence lui saute aux yeux : le maire de la ville est une personne hautement respectée, à qui tout le monde va serrer la main, qui d'office se place au-dessus des autres. C’est décidé : il fera de la politique. Le corps deviendra le peuple et il se lancera dans une stratégie minutieuse pour arriver à ses fins.

L’image du père militaire servira de guide, ne pas être faible comme son frère aîné ou sa mère sera ce qu’il faudra bannir. Etre au dessus du lot, être digne de porter le nom des Buchmann.

Seules la technique et la maîtrise ont grâce à ses yeux ; mais la nature n’est cependant jamais loin…

Tavares a le génie de contenir cette violence latente, de placer le lecteur en spectateur sans jamais juger. Seuls les titres de chapitre, sous forme d’aphorisme, nous orientent vers un commentaire possible.

Un livre d’une construction étonnante, qui se laisse lire très facilement et qu’on ne peut lâcher. Mais surtout un roman qui amène à réfléchir et que je considère un peu comme un OVNI littéraire !

En cours de lecture, le précédent roman de cet auteur : « Jérusalem »

Commenter cet article